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Agro-industrie : Les opérateurs restent sur leur faim

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Le Budget 2024-2025 ne répond pas dans une large mesure aux attentes des acteurs du secteur de l’agro-industrie. Ils estiment que les mesures proposées ne sont pas nouvelles et ne constituent qu’une continuité à court terme.

Le Budget 2024-2025 prévoit une série de mesures ambitieuses pour stimuler la production locale de cultures vivrières et réduire la dépendance aux importations. Parmi les initiatives clés, on note des subventions significatives pour la construction de fermes protégées, l’achat d’engrais et de semences, ainsi que des facilités pour l’importation d’animaux et l’acquisition d’équipements agricoles. Des subventions spécifiques sont destinées à encourager la production de pomme de terre, d’oignon, de carotte, de haricot, d’ail et de tomate, avec une aide renforcée pour les petits producteurs et les coopératives. Le gouvernement investit également dans les infrastructures, avec une enveloppe de Rs 10 millions pour l’amélioration des voies d’accès et des égouts dans la zone biologique de Britannia, et Rs 50 millions pour un entrepôt frigorifique au National Wholesale Market.

Souveraineté alimentaire

Pour soutenir le secteur du thé, des allocations supplémentaires et des facilités d’achats hors taxes pour des équipements spécialisés sont prévues. Les producteurs de canne à sucre bénéficieront d’une augmentation de la subvention pour le Cane Replantation Scheme, ainsi que de l’extension du Cane Revolving Fund Scheme. De plus, diverses aides sont annoncées pour les éleveurs, incluant des subventions pour l’importation et l’achat d’animaux, la construction d’abris, et une augmentation de la subvention sur les aliments pour animaux. Pour garantir l’efficacité de ces mesures, un suivi attentif sera nécessaire afin de s’assurer de leur impact réel sur la production agricole et la réduction de la dépendance aux importations.

De l’avis de Jacqueline Sauzier, secrétaire générale de la Chambre d’Agriculture, hormis les amendements aux Agricultural Workers (Job Contractors’) Regulations, les mesures proposées ne sont pas nouvelles et ne constituent qu’une continuité à court terme. Selon elle, les mesures essentielles comme la mise en place d’un Market Information System pour planifier la production et réduire les pertes dues à la surproduction, ainsi que les initiatives visant à faciliter la création de capacités de stockage pour gérer les excédents et promouvoir la transformation des produits agricoles, manquent cruellement.

«C’est du ‘business as usual’. Sur les prochaines années, sans une vision inclusive, il est à craindre que notre souveraineté alimentaire soit mise à mal. Est-ce que les deux nouvelles mesures annoncées, qui sont du ‘container farming’ et de l’agrivoltaic, vont apporter un souffle nouveau à la productivité agricole ? Permettez-moi d’en douter et j’espère avoir tort. Mais une chose est de plus en plus claire : le découragement est de plus en plus grand», déclare Jacqueline Sauzier.

Au niveau de la Chambre d’Agriculture, l’on fait remarquer que deux mesures cruciales étaient particulièrement attendues : la revalorisation de la rémunération de la biomasse et la subvention sur les semences de pomme de terre et d’oignon pour tous les producteurs, indépendamment de l’origine de leur achat. «Cela fait maintenant trois ans que la bagasse est rémunérée sur Rs 3,50 le kWh, ainsi que toutes les autres biomasses produites localement. Le National Biomass Framework préconise une revalorisation de la rémunération de ces biomasses, et c’est dans ce contexte qu’une rémunération de Rs 5,50 le kWh avait été demandée au regard des augmentations des coûts du ‘Heavy fuel oil’ et du charbon sur les trois dernières années. Et, de plus, cette revalorisation à Rs 5,50 le kWh permettra de booster la plantation de forets de biomasse dont la viabilité économique est mise à mal avec la rémunération actuelle de Rs 3,50 le kWh», soutient Jacqueline Sauzier.

Par ailleurs, elle exprime sa déception concernant l’absence de subvention de 75 % sur l’achat de semences de pomme de terre pour les producteurs qui choisissent d’acheter directement auprès de leurs fournisseurs. Cette méthode leur permet de contrôler la qualité des semences livrées ainsi que la date de livraison, optimisant ainsi le rendement à l’hectare. Sans cette subvention, avec le contrôle des prix aux consommateurs fixé à Rs 50 le kilo, les producteurs membres de la Chambre d’Agriculture ne peuvent plus commercialiser sous leur marque et voient leur marge de négociation avec les intermédiaires fortement réduite. Cette situation est particulièrement problématique, car ces producteurs contribuent à près de 80 % de la production nationale.

Le secrétaire de la Small Planters Association, Kreepalloo Sunghoon, déplore, pour sa part, que le Budget 2024- 2025 ne semble pas apporter des solutions efficaces pour accroître la production locale et réduire les importations. Il fait remarquer que la qualité des sols a atteint un seuil critique, un aspect totalement négligé dans les mesures proposées. De plus, il évoque la gestion de l’eau dans les plantations, un problème particulièrement aigu en période de sécheresse, qui n’a pas été abordé de manière adéquate. Il note également l’absence de mention d’un entrepôt pour le stockage à long terme de la pomme de terre et de l’oignon produits localement. Cette lacune expose les producteurs locaux aux aléas des importations, compromettant ainsi la stabilité de l’approvisionnement alimentaire. Selon lui, sans des initiatives concrètes pour améliorer la qualité des sols, gérer efficacement l’utilisation de l’eau et assurer un stockage adéquat, les mesures actuelles ne suffiront pas à sécuriser et améliorer la production agricole locale.

Au sein de la Mauritius Cooperative Agricultural Federation Ltd (MCAF), Sachin Sooknah, son président, exprime un niveau de satisfaction mitigé à l’égard des mesures du gouvernement présentées dans le Budget. Il met en exergue deux problèmes critiques : la pénurie de maind’œuvre et le transport. Ce sont des questions qui avaient été soumises lors des consultations pré-budgétaires.

Pour Sachin Sooknah, il est urgent de régulariser les prix des camions, qui sont actuellement très élevés pour les planteurs. À noter que l’association avait demandé un soutien financier sous forme de subventions pour l’acquisition de véhicules de transport, notamment pour le transport de la canne à sucre.

Réaction mitigée de la communauté des pêcheurs

Le secrétaire du Syndicat des pêcheurs, Judex Ramphul, a une réaction mitigée aux mesures annoncées dans le Budget 2024-2025 pour le secteur de la pêche. Si certaines demandes ont reçu une réponse positive, Judex Ramphul soulève d’importants points. Ainsi, il remet en cause l’efficacité de certaines mesures, comme l’allocation de Rs 200 000 pour le décès subit d’un pêcheur, qu’il juge insuffisante. Il pointe du doigt l’allocation de Rs 6 millions aux coopératives pour l’achat de bateaux semi-industriels et la subvention de Rs 1 million aux pêcheurs individuels pour le même achat, soulignant que ces montants sont largement insuffisants pour couvrir les coûts réels de l’équipement nécessaire. Par ailleurs, il critique le système qui oblige les pêcheurs à s’endetter davantage auprès de la Banque de Développement pour obtenir un financement supplémentaire. Selon lui, cette pratique ne fait qu’endetter les pêcheurs.

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