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Shamima Mallam-Hassam : «Les sociétés de global business doivent être exemptées du Corporate Climate Responsibility Levy»

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Contribuant autour de 14 % au produit intérieur brut et employant 15 000 employés, les services financiers constituent un pilier important de l’économie mauricienne. Aujourd’hui, ce secteur est à la croisée des chemins. Il doit maintenir sa compétitivité sur le marché indien malgré la concurrence de gift city et s’imposer comme la juridiction de choix pour canaliser les investissements en afrique. Pour Shamima Mallam-Hassam, la présidente de Mauritius Finance, qui a récemment été réélue pour un second mandat, une redéfinition du positionnement stratégique du centre financier international mauricien s’impose.

Félicitations tout d’abord pour votre réélection comme présidente de Mauritius Finance. Dans quelle mesure ce vote de confiance vous motive-t-il à poursuivre le travail initié durant votre premier mandat ?

Comme vous le savez, le processus veut que les membres votent pour les directeurs et que les directeurs, une fois élus, décident à l’issue d’une rencontre ceux qui assureront les rôles de la présidence et de la vice-présidence. Au niveau du Board, j’ai obtenu à l’unanimité le soutien de tous pour un second mandat à la présidence

Dans toutes les consultations, Mauritius Finance est appelée à fournir ses commentaires et ses points de vue. Ce qui fait de Mauritius Finance un acteur incontournable dans ce giron financier et économique. Nous comptons aujourd’hui plus de 160 membres. Nous maintenons le dialogue avec le régulateur, c’est-à-dire la Financial Services Commission (FSC), avec qui nous tenons des réunions régulières. Avec l’ancien Chief Executive, l’on avait des réunions trimestrielles. Je dois dire que toutes les problématiques que nous rencontrons n’ont pas encore été résolues, mais il y a du progrès. L’Officer-in-charge de la FSC nous a rencontrés, et il nous écoute et a établi une liste des priorités afin d’apporter des améliorations.

Au niveau de Mauritius Finance, vous plaidez pour un assouplissement du climat des affaires. Dites nous en plus ?

La flexibilité et la haute réactivité du secteur sont une condition sine qua non pour rattraper notre perte de compétitivité face à d’autres juridictions comme le Jersey, qui ciblent également le marché africain, et nous a raflé des parts de marché. Aujourd’hui, les investisseurs, financiers et entrepreneurs ciblant l’Afrique ont plusieurs choix. Ils regardent du côté de Jersey, de Guernesey, des Pays-Bas et du Luxembourg. Concernant l’Inde, GIFT City représente une menace. Avec cette compétition, nous allons perdre un peu de business.

Pour nous différencier de nos compétiteurs dans notre proposition de valeur, nous devons miser sur la vitesse d’exécution et l’évitement des goulots d’étranglement, que ce soit en termes de délai pour l’exécution des demandes d’application, d’ouverture de comptes bancaires ou de l’exercice du KYC. À ce jour, on prend trop de temps. Améliorer notre efficacité sur ces points va aider le secteur des services financiers à poursuivre ses activités et à se développer davantage.

Nous devons également poursuivre notre travail en termes de message et de positionnement. Le centre financier international de Maurice est arrivé à la croisée des chemins et il est temps que nous revoyons le modèle que nous voulons prôner aujourd’hui. Sera-t-il axé sur certaines régions ? Portera-t-il sur certains axes et certains produits ? C’est un positionnement que nous devons redéfinir. Il faudra communiquer clairement là-dessus à un moment donné.

Pendant longtemps, le centre financier international de Maurice a misé sur son rôle de passerelle vers l’Inde, mais cet axe perd de son attrait, car GIFT City va offrir des facilités intéressantes. Il y a aussi beaucoup d’activités qui se font onshore à travers des alternative investments funds (AIF) qui sont domiciliés en Inde. Donc, on perd un peu de cette part de marché. De plus, la révision du traité avec l’Inde va également affecter notre compétitivité.

Au regard de l’Afrique, l’on demeure effectivement la destination préférée pour canaliser les flux et structurer les fonds. Mais d’autres juridictions, à l’instar du Rwanda, de Casablanca et de Dubaï veulent également se positionner sur l’Afrique. Si l’on ne peut pas communiquer clairement et harmonieusement par rapport à ce qu’on veut être et notre proposition de valeur, cela deviendra problématique.

Quand nous avons demandé à disposer d’un budget pour la promotion du centre financier, ce n’est pas uniquement pour la tenue d’événements, mais aussi par rapport à toute la stratégie de communication et de marketing qui doit se faire, et ce de manière soutenue. Il faut peut-être avoir une agence de communication qui travaille avec le secteur sur les lignes directrices de la communication à déployer. Il ne faut pas oublier que les services financiers constituent le premier pilier de l’économie mauricienne, contribuant à 14 % au produit intérieur brut (PIB), et employant aujourd’hui 15 000 personnes. Celles-ci sont réparties entre les management companies, les banques et les autres secteurs d’activité.

C’est un secteur qui permet aux jeunes professionnels d’avoir un certain espoir par rapport à leurs opportunités de carrière. Si vous regardez comment les jeunes professionnels progressent, et à quelle vitesse, avec les opportunités de développement professionnel, de frottement et d’évolution hiérarchique, on peut dire qu’aucun autre secteur économique ne se compare au secteur financier. Beaucoup de jeunes professionnels ont le privilège de siéger sur des comités de direction de multinationales et de grosses compagnies de private equity et d’avoir un frottement professionnel et culturel indiscutable.

Il faut continuer à se développer en sachant quelle est la stratégie de positionnement que l’on veut asseoir compte tenu de nos spécificités et de notre force. Par exemple, il s’agit de savoir si l’on veut être une destination à valeur ajoutée ou de back-office. Il n’y a pas de problème à ce qu’une partie des activités auxquelles s’adonne le centre financier international de Maurice se focalisent sur les prestations de back-office. C’est d’ailleurs le cas de grosses sociétés en activité, bien que cela se résume à un gros volume de travail mais avec peu de valeur ajoutée. Où se trouve le bon équilibre ? Avons-nous aujourd’hui la capacité de devenir une destination pour les structures de fund management ou de corporate finance ? Je parle aux gens autour de moi et je suis convaincue que le segment Private clients grandira avec les oppor- tunités qui se présentent à nous.

La richesse des high-net-worth individuals d’Afrique, qu’elle soit en espèces ou sous forme d’actifs, a traditionnellement été utilisée dans des juridictions comme Monaco et la Suisse. Sachant que ces juridictions font face à plus de restrictions, Maurice a une belle carte à jouer. Il nous faut une stratégie claire et qu’on communique clairement par rapport à cela. C’est sûr que les sociétés engagées dans le fund management portées sur l’Afrique apprécient Maurice, car elles voient en notre juridiction une plateforme intéressante au vu de la diversité des produits offerts, de notre législation très flexible. De plus, Maurice est un État de droit et il y a la possibilité de faire de l’arbitrage à partir de chez nous. Tout cela forme un package qui rend notre centre financier intéressant pour les sociétés de fund management.

Il y a aussi le segment des venture capital (VC). La réglementation telle qu’elle est aujourd’hui à Maurice est restrictive et pas suffisamment flexible pour ce genre de produits. Il y a du travail à faire aujourd’hui pour attirer ce genre de clientèle. Les VC vont tous aujourd’hui au Delaware. On en discutait avec l’African Venture Capital Association, qui regroupe les acteurs de VC et de private equity. On ne peut laisser perdurer dans le long terme cette migration des VC africains vers le Delaware. Il faut que les sociétés de VC soient domiciliées dans une juridiction africaine. Il faudrait que Maurice leur offre cette plateforme répondant à leurs attentes.

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